Médecine nucléaire : le nouveau régime juridique des autorisations complété avec la publication des deux nouveaux textes réglementaires attendus

Une simplification et une refonte des CPOM bienvenues – Ordonnance n°2020-1407 du 18 novembre 2020 relative aux missions des ARS

Une simplification et une refonte des CPOM bienvenues – Ordonnance n°2020-1407 du 18 novembre 2020 relative aux missions des ARS

 

« Depuis leur création en 1996, les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) apparaissent, au gré des modifications législatives et réglementaires, comme un dispositif sédimenté, volumineux, peu souple et de moins en moins stratégique.

Il est donc nécessaire de le recentrer sur la stratégie pour décliner le projet régional de santé (PRS) et les plans nationaux de santé.

Il convient aussi d’alléger le CPOM des points sur lesquels il est redondant par rapport à d’autres dispositifs et enfin de réduire la charge de travail liée à cet exercice en limitant le nombre d’objectifs et d’indicateurs prévus pour son suivi.

L’objectif des dispositions proposées est de refonder le CPOM entre les ARS et les établissements de santé afin qu’il soit davantage stratégique et territorial.

Pour cela, à titre principal, le dispositif réduit le champ du contrat et donc le nombre de contrats et définit deux axes stratégiques (positionnement territorial et pilotage interne des établissements de santé). »

(rapport au président de la république relatif à l’ordonnance n°2020-1407 du 18 novembre 2020 relative aux missions des ARS)

La raison semble enfin guider le pouvoir exécutif face à l’indigestion et le monstre administratif que sont devenus les CPOM tant dans leur phase d’élaboration, de gestion que d’évaluation (peu ou pas menée car chronophage ; indicateurs, souvent pléthoriques, dont on a pu s’interroger également lors des demandes de renouvellement d’autorisation notamment quant à leur pertinence, finalité, robustesse) dont les premières victimes ont été les ARS !

Ainsi, les CPOM dans leur nouvelle configuration seront désormais emprunts des caractéristiques suivantes :

  • Un CPOM désormais exclusivement conclus entre l’ARS et les établissements de santé, les titulaires d’autorisations intégrant une catégorie à laquelle l’ordonnance donne naissance celle des « structures distinctes de l’établissement de santé concourant à la prise en charge du patient » pouvant être appelée au CPOM
  • Un contenu recentré, sur l’essentiel peut être enfin ?
  • Le retour à une durée fixe,
  • Une évaluation en résonnance avec un timing pragmatique
  • Du pragmatisme par la possibilité d’une signature d’un contrat unique (GHT,personne morale de droit privée détenant plusieurs établissements de santé),
  • Un renouvellement tacite calqué dans son principe sur celui des autorisations sanitaires
  • Les établissements détenteurs d’une autorisation de soins de longue durée laquelle sera annexée au CPOM
  • Entrée en vigueur du nouveau dispositif

CPOM exclusivement conclus entre les établissements de santé et les DGARS – Naissance d’une nouvelle catégorie, celle de « Structure distincte d’un établissement de santé concourant à la prise en charge du patient » pouvant être appelée à conclure un CPOM

Tout « titulaire d’autorisation » était jusqu’à la publication récente de l’ordonnance tenu au même titre que les établissements de santé de conclure un CPOM avec le DGARS.

Le pouvoir exécutif dans la nouvelle rédaction de l’article L 6114-1 du code de la santé publique vient les « affranchir » de cette obligation en supprimant toute référence les concernant.

Ainsi et désormais, parce que relevant de la catégorie des « titulaires d’autorisation » définie à l’article L 6122-3 du CSP soit – d’un ou plusieurs médecins, éventuellement associés pour leur exercice professionnel ou pour la mise en commun de moyens nécessaires à cet exercice ; d’une personne morale dont l’objet porte sur l’exploitation, d’une activité de soins ou d’un équipement matériel lourd ou la pratique des activités propres aux laboratoires de biologie médicale – les cabinets de radiologie détenteurs d’un EML par exemple, ou encore les GCS de moyens ne seront plus tenus de conclure de CPOM.

Doit-on pour autant déduire de cette mesure de suppression que ces « titulaires d’autorisation » vont évoluer et faire évoluer leur activité selon des axes tant stratégiques que territoriaux en totale déconnexion de toute contractualisation, l’autorisation détenue et renouvelée constituant à elle seule l’alpha et l’Omega ?

Non, car tout en supprimant les titulaires  d’autorisation de l’obligation place est faite, naissance est donnée à une nouvelle « catégorie » celle de « Structure distincte d’un établissement de santé concourant à la prise en charge du patient » laquelle certes ne sera pas tenue à conclusion d’un CPOM avec le DGARS mais pourra être appelée (et la nuance est importante) par le DGARS au CPOM de l’établissement …. auquel elle concoure.

« Structure distincte d’un établissement de santé concourant à la prise en charge du patient » 

Que sont ces structures ? Quelles configurations revêtent-elles ? Toutes, presque toutes (en dehors des personnes physiques difficilement qualifiable de structure de notre point de vue) tant le concept, la notion de « structure » est large !

Il en ira ainsi des titulaires d’autorisation à n’en pas douter (personnes morales détenteurs d’EML, GCS …), mais plus encore : des réseaux de santé, CPTS, GIE, maisons de santé, centre de santé … toute structure composée de professionnels de santé médicaux, paramédicaux etc … dès lors qu’elles se distinguent de l’établissement de santé et concourent à la prise en charge des patients.

Si ce « mécanisme » peut être salué par la souplesse introduite et son étendue il est toutefois empreint d’une approche qui reste hospitalo-centrée et dont la tendance, définitivement lourde est à celle de l’aspiration, l’attraction vers l’établissement de santé de tout ce qui évolue en périphérie, considéré comme satellisé.

Il sera intéressant dans les faits de voir comment les ARS utiliseront cette faculté que leur offre la nouvelle rédaction de l’article L 6114-1 ; comment les différents « protagonistes » (acteurs principaux, acteurs concourant à la prise en charge) s’y retrouveront dans les engagements mutuels et respectifs ; quelles seront les marges de manœuvre, d’intégration …de discussion tout simplement ?

Contenu des CPOM

L’article L 6114-2 du CSP fait l’objet d’un profond remaniement qui illustre la simplification et le recentrage voulu du CPOM sur la stratégie pour décliner le PRS, les plans nationaux de santé, ainsi que le pilotage interne des établissements.

La physionomie du texte s’en ressent fortement avec la suppression de 5 alinéas[i] sur les 8 que comprenait l’article L 6114-2, et ainsi aboutir à une rédaction plus digeste, en ces termes :

« Les contrats mentionnés à l’article L. 6114-1 déterminent les objectifs stratégiques des établissements de santé sur la base du projet régional de santé défini à l’article L. 1434-1, notamment du schéma régional de santé défini à l’article L. 1434-3 ou du schéma interrégional mentionné au 2° de l’article L. 1434-6.

Ces objectifs stratégiques concernent le positionnement territorial de l’établissement et le pilotage interne de l’établissement.

Le contrat peut également déterminer d’autres objectifs stratégiques en lien avec les missions des établissements de santé définies aux articles L. 6111-1 à L. 6111-7.

Chaque objectif est assorti d’un indicateur unique.

Les contrats précisent les engagements des établissements, notamment de retour à l’équilibre financier, qui peuvent donner lieu à un financement par la dotation prévue à l’article L. 162-22-14 du code de la sécurité sociale ».

 Durée des CPOM

La loi HPST de 2009 était revenue sur la durée des CPOM en fixant le principe non plus d’une durée de 5 ans mais bien d’une durée maximale de 5 ans (cette modification ayant pour objectif d’adapter si le besoin s’avérait nécessaire la durée des CPOM à celle de l’autorisation délivrée par exemple).

Le texte de l’Ordonnance revient sur le dispositif en cours pour réadopter celui en vigueur avant 2009 issu de l’Ordonnance 2003 – 850 du 04 septembre 2003 portant simplification de l’organisation et du fonctionnement du système de santé ainsi que des procédures de création d’établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation.

 Evaluation des CPOM

Les ARS n’ont jamais, sauf les deux premières années de l’instauration du principe réellement pu mener l’évaluation annuelle des CPOM jusqu’à lors prévue par les textes.

La lourdeur d’un tel dispositif est vite apparue couplée aux attendus d’une telle évaluation ( plan d’action suite à évaluation, suivi du plan d’action etc…) et éventuelles pénalités tirées de l’inexécution partielle ou totale des engagements au CPOM (article L 6114-1 du CSP)

En fixant une évaluation à mi-parcours du CPOM, plus exactement à échéance de la moitié de la durée du contrat, le pouvoir exécutif fait preuve de pragmatisme, l’évaluation annuelle du CPOM devant une faculté pour le DGARS en cas de difficultés de l’établissement (difficultés non précisées mais dont on devine qu’elles viseraient principalement celles liées à la situation financière de l’établissement)

La signature de contrat unique avec plusieurs établissements de santé publics parties à un GHT confirmée, celle d’une signature unique pour les établissements de santé privés relevant d’une même personne morale introduite

La possibilité pour les établissements de santé public partis à un GHT de conclure avec l’ARS un CPOM unique était déjà, certes par dérogation à l’article L 6114-1 (article « socle » du CPOM) et L 6143-7 du CSP rendue possible par l’introduction d’un nouvel article L 6132-5-1[ii] par la Loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 dans son article 37.

Quant aux établissements de santé privés relevant d’une même personne morale : si comme le précisait à juste titre par exemple l’ARS Ile de France dans son « Guide méthodologique d’élaboration et de suivi des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens » dans sa version en 2019 que « c’est le représentant légal de la personne morale qui exploite l’établissement de santé qui est compétente pour conclure le CPOM avec l’ARS.L’ARS ne peut conclure un CPOM avec un établissement de santé qui ne détient pas la personnalité juridique. Dans le cadre de l’exploitation de plusieurs établissements de santé par une personne juridique unique, seule la personne morale qui exploite l’ensemble de ces établissements à qualité pour conclure le CPOM, les établissements eux-mêmes étant dépourvues de la personnalité juridique. »

Ce qui apparaît en revanche comme une « nouveauté » tirée de la pratique et du pragmatisme, c’est la possibilité pour le DGARS de conclure un contrat unique avec plusieurs établissements de santé privés relevant d’une même personne morale.

Silence vaut renouvellement des CPOM – Décompte du délai de 4 mois après dépôt de la demande

L’article L 6114-1 dans sa rédaction antérieure faisait obligation à l’ARS de se prononcer sur la demande de renouvellement dans un délai de quatre mois à compter de sa réception. Désormais « l’absence de décision expresse, à l’expiration d’un délai de quatre mois après le dépôt de la demande, vaut renouvellement tacite du contrat » (article L6114-1)

Quant au refus de renouvellent il doit comme précédemment être motivé.

Nous ne pouvons que saluer le recours au dispositif du renouvèlement tacite, dispositif applicable et donc parfaitement maitrisé de tous (normalement) concernant les demandes de renouvellement d’autorisation d’activités de soins ou d’EML, le délai de 4 mois devant désormais être décompté non plus à compter de la réception de la demande par l’ARS mais après dépôt de cette dernière.

 

CPOM et établissements disposant d’une autorisation d’activité de soins de longue durée

Par nouvel article L 6114-1-2 le CPOM de l’établissement disposant d’une autorisation d’activité de soins de longue durée « comporte une annexe relative à l’activité cosignée par le président du conseil départemental.

L’absence de signature de cette annexe par le président du conseil départemental ne fait pas obstacle à la signature du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens.


Pour les soins de longue durée dans les établissements habilités à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale, cette annexe vaut convention à l’aide sociale départementale prévue aux articles L 313-8-1 et L 342-3-1 code de l’action sociale et des familles lorsqu’elle est signée par le président du conseil départemental.

Lorsque l’agence régionale de santé et le conseil départemental ne cosignent pas l’annexe, chacune de ces autorités procède à la tarification des soins de longue durée pour les prestations relevant de ses compétences.

Lorsque le président du conseil départemental n’est pas signataire de l’annexe du contrat, celui-ci établit une convention à l’aide sociale avec l’établissement de santé, titulaire d’une autorisation d’activité de soins de longue durée, habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale. »

L’article L 313-12 IV bis est quant à lui modifié en ces termes : « les établissements de santé autorisés, en application de l’article L 6122-1 du code de la santé publique, à délivrer des soins de longue durée concluent une annexe au contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (i.e. auparavant référence à la convention pluriannuelle) prévu à l’article L. 6114-1 de ce code avec le président du conseil départemental et le directeur général de l’agence régionale de santé ».

Entrée en vigueur du nouveau dispositif

Conformément au III de l’article 5 de l’ordonnance n° 2020-1407 du 18 novembre 2020, Ies CPOM en cours à la date de publication de l’ordonnance restent régis, jusqu’à leur terme, par les dispositions dans leur rédaction applicable antérieurement à l’entrée en vigueur de l’ article 5 de l’ordonnance venant modifier le régime juridique des CPOM.

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[i] Les CPOM « précisent les engagements pris par l’établissement de santé ou le titulaire de l’autorisation en vue de la transformation de ses activités et de ses actions de coopération.

Les contrats fixent, le cas échéant par avenant, les éléments relatifs à des missions de soins ou de santé publique spécifiques qui sont assignées à l’établissement de santé ou au titulaire de l’autorisation par l’agence régionale de santé. Ils fixent également les objectifs quantitatifs et qualitatifs des activités de soins et équipements matériels lourds pour lesquels une autorisation a été délivrée et en définissent les conditions de mise en œuvre.

Les contrats sont signés ou révisés au plus tard six mois après la délivrance de l’autorisation. A défaut de signature du contrat ou de l’avenant dans ce délai, l’agence régionale de santé fixe les objectifs quantitatifs et qualitatifs et les pénalités prévues à l’article L. 6114-1.

Lors du renouvellement du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens prévu à l’article L. 6114-1, les objectifs quantitatifs et qualitatifs mentionnés à l’alinéa précédent sont révisés.

Lors du renouvellement de l’autorisation prévu à l’article L. 6122-10, ou lorsque l’autorisation a fait l’objet de la révision prévue à l’article L. 6122-12, les objectifs quantitatifs et qualitatifs fixés par le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens, relatifs à l’activité de soins ou l’équipement matériel lourd faisant l’objet de l’autorisation, sont révisés dans les six mois suivant le renouvellement ou la décision de révision de l’autorisation ».

 

[ii] Article L6132-5-1

« Les établissements parties à un même groupement hospitalier de territoire peuvent être autorisés par le directeur général de l’agence régionale de santé, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’Etat, au regard de l’intention et des capacités de l’ensemble des établissements parties, à :

(…)

3° Conclure avec l’agence régionale de santé, par dérogation à l’article L. 6114-1 et au 1° de l’article L. 6143-7, un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens unique pour l’ensemble des établissements du groupement. »

 

Besoins exceptionnels en Imagerie – Arrêt sur images

Besoins exceptionnels en Imagerie – Arrêt sur images

La réforme des autorisations sanitaires prévue par la loi n° 2016 – 41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé est à peine engagée par la DGOS lorsque se finalisent dans presque toutes les régions les travaux relatifs au PRS 2.

En effet, le programme de travail tel qu’arrêté à l’époque débute en 2018, porte notamment sur 18 activités de soins et les reconnaissances contractuelles relevant du secteur MCO, se découpe sur ce dernier en 3 « vagues » ( la 1ère consacrée aux activités interventionnelles [cardiologie, neurologie, oncologie et autres activités interventionnelles], la médecine nucléaire et les urgences, les vagues 2 et 3 concernant la périnatalité, la cancérologie, la chirurgie, l’anesthésie, les soins critiques, la médecine et la dialyse), pour normalement aboutir en 2020.

Intégrant ce retroplanning à leurs travaux les ARS vont selon soit sous tendre, soit énoncer clairement que les SRS publiés ont une temporalité transitoire corrélée aux évolutions législatives et réglementaires à venir liées à la réforme des autorisations sanitaires prévues par la loi de modernisation de notre système de santé de 2016.

Retards, blocages au sein des groupes de travail et crise sanitaire liée à la Covid vont alors porter un coup d’arrêt aux travaux en cours, y compris pour ceux aboutis et dont le passage devant le Comité National de l’Organisation Sanitaire et Sociale était planifié.

La 2ème vague que nous connaissons laisse à ce jour peu d’espoir de reprise dans des délais courts de l’ensemble de ces travaux et les ARS qui prévoyaient à mi-parcours d’application de leur PRS une révision de celui-ci pour intégrer les réformes annoncées ne peuvent qu’acter du report sine die de cette dernière.

Or, si les objectifs qualitatifs fixés lors de l’élaboration des PRS/ SRS l’ont été au regard d’un cadre juridique existant, l’absence de rénovation de ce dernier étant à ce stade sans incidence sur les autorisations détenues, il n’en est pas de même concernant les objectifs quantitatifs. En effet, parfois ceux-ci ont été fixés avec cette certitude d’une révision à mi – parcours, ce qui devait conduire, parce que les PRS/SRS ont été publiés entre 2018 et 2019, à envisager leur révision, par « volet thématique » notamment dans le courant de l’année 2020, au plus en 2021.

Quelle est alors la marge de manœuvre des ARS dans ce contexte et situation d’avoir d’ores et déjà délivré ou d’être en voie de délivrer pour certaines ce qui correspond à leurs « ultimes » autorisations, c’est-à-dire celles qui à mi-parcours du SRS satisfont aux besoins actuels de la population,  mais qui ne pourront satisfaire les besoins futurs de la population, a minima d’ici la révision du SRS ?

Une seule voie : celle du recours au dispositif relatif aux « besoins exceptionnels », dispositif en vertu duquel :

« lorsque les objectifs quantifiés définis par le schéma régional d’organisation des soins sont atteints dans un territoire de santé, le directeur général de l’agence régionale de santé peut constater, après avis de la commission spécialisée de la conférence régionale de santé et de l’autonomie compétente pour le secteur sanitaire, qu’il existe des besoins exceptionnels tenant à des situations d’urgente et d’impérieuse nécessité en matière de santé publique et rendant recevables, en vertu du quatrième alinéa de l’article L. 6122-9, les demandes d’autorisation ayant pour objet de répondre à ces besoins. Dans ce cas, le bilan mentionné à l’article R. 6122-30 fait apparaître la nature et l’étendue de ces besoins, les objectifs quantifiés de l’offre de soins nécessaire pour y satisfaire, par activités de soins et par équipements matériels lourds, ainsi que les lieux où l’implantation est souhaitée ». ( article R 6122-31 du code de la santé publique).

C’est ce dispositif que les ARS d’Occitanie et d’Ile de France[i] en matière d’imagerie se sont vues contraintes d’appliquer ; ceci est au demeurant peu surprenant à la lecture de chacun de leur « volet imagerie », la première privilégiant « en termes d’installation d’équipements matériels lourds, une évolution prudentielle […] pour atteindre un seuil cible. Ce taux cible à atteindre pour les IRM et scanner TDM peut faire l’objet d’une progression par étapes : un seuil à atteindre dans 2 ans avec une évaluation du respect des conditionnalités[ii], puis son évaluation, objectifs à réévaluer pour les années suivantes », la seconde après avoir rappelé la réforme du cadre juridique des autorisations engagée par la DGOS précisant que « cette réforme annoncée devrait conduire à une révision du SRS à mi-parcours de la période d’application du PRS 2 (fin 2019 début 2020). Les objectifs quantifiés et qualitative pour l’imagerie ont ainsi été établi sur la base du droit positif actuel. »

Décisions des ARS Occitanie et Ile de France fixant les besoins exceptionnels

  • C’est au printemps, en pleine vague 1 de la crise sanitaire que l’ARS Occitanie va recourir au dispositif des « besoins exceptionnels » pour ses départements de l’Hérault, du Gard et du Gers, aux motifs dans chacun d’entre eux

« d’éviter des pertes de chance pour les patients induite par un allongement de fait des délais d’attente »

corrélée pour le premier à la nécessité de répondre à une demande croissante d’examens d’IRM, le second de pallier l’absence d’implantation de scanner, le troisième enfin, parce qu’il « existe un risque d’interruption totale de l’accès aux examens d’imagerie pour les patients du bassin auscitain, notamment en cas de panne des appareils installés ou de non renouvellement des contrats de location de ces appareils virgule avec impossibilité d’organiser un report de façon suffisante en réponse aux besoins sur le centre l’allié de Condom ». [iii]

  • Quant à la décision publiée tout dernièrement par l’ARS Île-de-France (arrêté n°DOS-2020/2714 du 13 octobre 2020) si elle se situe dans la même veine elle se démarque par l’exposé des motifs multifactoriels qui conduisent aujourd’hui face à la saturation en nombre d’équipement matériels lourds Aurélien Rousseau, DGARS d’Ile de France à recourir au dispositif des « besoins exceptionnels » pour des IRM ( Territoires de Paris, de l’Essonne, de la Seine-Saint-Denis et du Val de Marne,) comme des scanners (Territoires de Paris et la Seine-Saint-Denis).

Cet arrêté, dont nous tenons ici à saluer notamment la clarté et le souci d’un argumentaire aussi bien didactique que pédagogique, illustre parfaitement de notre point de vue le triptyque actuel né de la conjonction entre :

  • La saturation des équipements en l’absence de révision des objectifs quantifiés liés à l’absence de révision aboutie du cadre juridique afférent,

CONSIDERANT que lors de la publication du SRS-PRS2 une révision du cadre juridique engagée par la Direction générale de l’Offre de soins devait aboutir fin 2019 à une révision du SRS à mi-parcours ;

qu’en conséquence, les objectifs quantifiés pour l’imagerie n’ont pas été prévus pour satisfaire aux besoins au-delà de cette période ;

que compte-tenu des délais de préparation de cette réforme et de la mobilisation des acteurs de santé pour lutter contre l’épidémie de la COVID-19 qui a touché la France en 2020, aucune révision du SRS n’a pu être conduite ;

–  La crise sanitaire liée à la Covid laquelle contraint à la mise en place d’organisations qui ont vocations à s’inscrire dans la durée, qui augmentent les temps de prise en charge et allongent les délais d’attente faisant courir un risque de perte de chance pour le patient,

CONSIDERANT que pour autant les organisations mises en place dans le contexte de crise sanitaire ont renforcé les besoins d’équipements matériels lourds utilisés à des fins diagnostiques :

– le temps de prise en charge par patient est augmenté avec les précautions sanitaires pour limiter le risque infectieux : de +30% en imagerie par résonance magnétique (IRM) et de +15% en scanner selon une estimation communiquée par le Conseil professionnel de la radiologie française (G4) à l’ARS en date du 10 septembre 2020 ;

– les structures doivent disposer d’une « marge » d’équipements pour gérer les crises épidémiques (circuits distincts) et les retards afin de limiter le risque de perte de chance pour les patients induit par un allongement de fait des délais d’attente ;

que ces organisations ont vocation à s’inscrire dans la durée, y compris après la période épidémique actuelle ;

–  L’augmentation des prescriptions d’imagerie en coupe encouragée par de nouvelles indications ( notamment endométriose, cancers de la prostate et du sein, scanners thoraciques, urgences…), l’évolution des machines.

CONSIDERANT qu’une augmentation des prescriptions d’imagerie en coupe est encouragée par :

– de nouvelles indications : notamment l’endométriose, les cancers de la prostate (recommandation de l’Association Française d’Urologie d’IRM systématique) et du sein, les scanners thoraciques, les urgences (ex : thrombectomie),

l’évolution des machines (avec un scanner spectral, par exemple, l’utilisation diminuée de produit de contraste facilite le recours à cet examen) ;

 

Il en ressort que si

« L’impact de ces évolutions pérennes sur l’offre actuelle a été calculé au regard d’un nombre d’équipement d’imagerie en coupe par million d’habitants, pour tendre

– vers 27 machines d’imagerie par résonance magnétique (IRM) par million d’habitants (soit 30% de plus que les 21 actuellement autorisées en moyenne en Ile-de-France),

– vers 24 scanographes par million d’habitants (soit 15% de plus que les 21 actuellement autorisées en moyenne en Ile-de-France) ;

L’ARS veillera dans le

« respect des objectifs du SRS-PRS2, [….] particulièrement à ne pas déstabiliser les coopérations notamment publiques-privées existantes ou en cours et par conséquent l’imagerie hospitalière et la permanence des soins ; que ce point de vigilance sera pris en compte lors de l’analyse des projets, en particulier en cas de concurrence sur un territoire »;

A souligner, enfin, la prise en compte par l’ARS IDF et de sa transparence à en faire mention dans sa décision de « l’estimation communiquée par le conseil professionnel de la radiologie française (G4) le 10 septembre 2020 », ou encore de la « recommandation de l’association française d’urologie » pour les indications en matière de cancer de la prostate.

A consulter :

[i] Les ARS Auvergne Rhône-Alpes et Pays de la Loire toutes deux évoquent la réforme des autorisations à venir en matière d’imagerie sans précisions particulières

[ii] Nous nous interrogeons sur ce que l’ARS a entendu par « conditionnalités » et la lecture de l’ensemble du volet imagerie à cet égard est peu éclairante.

[iii] Arrêté numéro 2020- 1657 du 28/5/2020 fixant des besoins exceptionnels pour les équipements matériels lourds en Occitanie

Publication des premières décisions de DGARS portant renouvellements et nouvelles autorisations d’activités de soins dérogatoires

Publication des premières décisions de DGARS portant renouvellements et nouvelles autorisations d’activités de soins dérogatoires

Nous nous sommes fait échos dans une actualité précédente de la réactivation du dispositif suite à la publication d’un arrêté ministériel en date du 18 septembre 2020 en vertu duquel les DGARS sont habilités non seulement à autoriser mais également à renouveler les autorisations précédemment délivrées aux établissements de santé visant à leur permettre d’exercer une activité de soins autre que celle au titre de laquelle ils ont été autorisés[i].

A cette publication a succédé dans un temps très rapproché qui ne peut surprendre au regard du contexte celles des arrêtés des DGARS des régions AuvergneRhône-Alpes [ii] et Hauts de France [iii] à ce jour qui s’emparant de l’habilitation concédée délivrent pour le premier autorisations portant renouvellement « afin d’assurer une réponse régionale graduée et immédiate aux conséquences de l’épidémie en maintenant le nombre de sites de réanimation mobilisable sur l’ensemble de la région ainsi que les coopérations mise en place pendant la crise pour prévenir tout risque de rupture de prise en charge» [iv] de l’ensemble des autorisations lors de la première vague délivrées, tandis que pour le second les arrêtés portent tout aussi bien sur des renouvellements que de nouvelles autorisations [v].

Ainsi, en d’autres termes mais plus précisément, si au niveau de la région Auvergne-Rhône-Alpes ce qui paraît avoir été privilégié, en totale cohérence avec le motif précité notamment, c’est un renouvellement « en masse » au sein d’un arrêté unique portant à l’identique sur l’offre de soins qu’il a fallu mobiliser lors de la première vague [vi], – c’est-à-dire relevant aussi bien des prises en charge en réanimation [vii], en chirurgie du cancer [viii], qu’en médecine (Hospitalisation Complète ou Hospitalisation à Temps Partiel [ix]) ou encore en Soins de Suite et Réadaptation[x]-, au sein de la région des Hauts de France renouvellements [xi] et nouvelles autorisations [xii] sont délivrés, par arrêtés individuels et successifs, portant exclusivement, à ce jour, sur les besoins au titre de l’activité de soins de réanimation.

Si l’on se penche sur les motifs, les raisons de fait  à l’appui desquels les DGARS justifient de leurs décisions, ceux-ci sont révélateurs de l’approche comme du niveau des préoccupations.

Ainsi, si au niveau de la région des Hauts de France il s’agit essentiellement, suite aux « situations observées à l’étranger et en France, et des données disponibles, (…) de prendre les mesures nécessaires afin de pouvoir faire face à un afflux important de patients, notamment dans les services d’urgence et de réanimation ; considérant que la crise née de la propagation du Covid – 19 constitue une menace sanitaire grave au sens de l’article l 6122 – 9 – 1 du code de la santé publique ; qu’ en application de ces dispositions afin que les capacités des établissements de santé puissent être augmentées rapidement, les directeurs généraux des ARS ont été habilités à autoriser ces établissements à réaliser une activité de soins autre que celles pour lesquelles ils ont été autorisés et à renouveler les autorisations déjà accordées dans les conditions prévues à l’article R 6122- 32 – 1 du CSP » , les motifs à l’appui desquels le DGARS de la région Auvergne-Rhône-Alpes justifie pour sa part de la décision de « procéder au renouvellement sans délai de ces autorisations afin d’assurer une réponse régionale graduée et immédiate aux conséquences de l’épidémie en maintenant le nombre de sites de réanimation mobilisable sur l’ensemble de la région ainsi que les coopérations mise en place pendant la crise pour prévenir tout risque de rupture de prise en charge» sont tirés :

  • D’une part, du « risque d’indisponibilité de lits d’hospitalisation ou de capacité de prise en charge spécialisée susceptible de remettre en cause une prise en charge adaptée des patients atteints par le virus SRAS-CoV-2 »
  • Et d’autre part du « contexte de reprise de circulation active du virus ».

De part et d’autre, qu’il s’agisse des nouvelles autorisations ou des renouvellement la durée de ces dernières est fixée à 6 mois (soit selon mars ou avril 2021), la date de départ du renouvellement ainsi que celle de fin de validité étant pour éviter toutes ambiguitées précisées pour chacun des établissements dont liste est dressée et annexée à l’arrêté pris par le DGARS de la région AuvergneRhône-Alpes.

Enfin, conformément aux dispositions réglementaires afférentes à ce dispositif avis de chaque COSOS a été recueilli, ce dernier étant, le contraire en aurait été surprenant, favorable.


[i] Journal Officiel du 20 septembre 2020

[ii] Arrêté n° 2020-17-0327 du 22 septembre 2020 portant renouvellement des autorisations d’activités de soins délivrées à plusieurs établissements de santé en application de l’article 7 de l’arrêté du 23 mars 2020 modifié prescrivant les mesures d’organisation et de fonctionnement du système de santé nécessaires pour faire face à l’épidémie de COVID-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire – Recueuil des Actes Administratif du 23 septembre 2020

[iii] Divers arrêtés ont à ce jour été publiés pour les premiers datés du 23 septembre 2020 au sein du recueil des actes administratifs du 24 septembre 2020 et les seconds du 25 septembre 2020 au sein de celui en date du 29 septembre 2020

[iv] Cf considérant de l’arrêté précité du 22 septembre 2020

[v] C’est le constat que nous dressons au jour de la publication de cet article

[vi] De manière assez surprenante qu’il s’agisse du Centre de lutte contre le cancer Jean Perrin ou encore de la Fondation « Les villages de santé d’hospitalisation en altitude » nous n’avons trouvé trace d’aucune de leur autorisation initiale dérogatoire au RAA . Il s’agit certainement d’une « omission » dans la publication ou d’une mauvaise lecture de notre côté

[vii] Centre Hospitalier Ardèche Méridionale, Hôpital Privé Drôme Ardèche, Centre Médico-Chirurgical de Tronquières, Centre Hospitalier des Hôpitaux Drôme Nord, Groupe Hospitalier Mutualiste de Grenoble, Centre Hospitalier du Forez, Pôle Santé République, CLCC Léon Bérard, Hôpital Privé Jean Mermoz, Clinique Médico-Chirurgicale de Charcot.

[viii] Centre de lutte contre le cancer Jean Perrin ( chirurgie des cancers digestifs), Centre Hospitalier Albertville Moutiers (chirurgie des cancers du sein et urologiques)

[ix] Polyclinique Saint François Saint Antoine, GCS clinique Herbert, Fondation « Les villages de santé d’hospitalisation en altitude »

[x] Fondation « Les villages de santé d’hospitalisation en altitude » : Soins de Suite et Réadaptation spécialisé, affections de la personne âgée Polypathologiques, dépendantes ou à risque de dépendance en hospitalisation complète

[xi] Hôpital privé de Bois-Bernard, Polyclinique Saint-Côme, clinique des 2 caps à Coquelles, clinique Victor Pauchet de Butler à Amiens, Centre Médical Chirurgical Obstétrical Côte d’Opale à Saint-Martin-Boulogne, clinique Anne d’Artois à Béthune, Clinique du Parc Saint-Lazare à Beauvais, Hôpital Privé la Louvière, Clinique Saint Isabelle à Abbeville, Hôpital Privé Arras les Bonnettes

[xii] AHNAC sur le site de l’Hôpital privé de Villeneuve-d’Ascq, Polyclinique de la Clarence à Divion