Loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 – Décision du 16 décembre 2021 du Conseil constitutionnel

27 dispositions de la loi déférée comme « cavaliers sociaux », c’est-à-dire comme ne relevant pas du champ des lois de financement de la sécurité sociale défini à l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale ont été censurées par le Conseil constitutionnel suite à sa saisine par 60 sénateurs, ce qui ne préjuge pas comme le rappelle le communiqué de presse accompagnant sa décision « de la conformité de leur contenu aux autres exigences constitutionnelles. Il est loisible au législateur, s’il le juge utile, d’adopter à nouveau de telles mesures, dont certaines apparaissant au demeurant susceptibles d’être déployées sans attendre son éventuelle intervention ».

Le Ministère des solidarités et de la santé dans son propre communiqué de presse évoque d’ailleurs une censure « pour des motifs de procédure » et précise que si « la très grande majorité de dispositions introduites par amendement parlementaire (..) ne respectent pas le cadre constitutionnel du domaine d’intervention possible des lois de financement de la sécurité sociale, notamment car elles n’ont pas ou peu d’effet sur les dépenses ou les recettes de la sécurité sociale « , « aucune disposition n’a été censurée pour des motifs de fond. »

S’en suit, dans le même communiqué du Ministère des solidarités et de la santé avant de conclure sur une LFSS pour 2022 qui porte « une ambition forte de transformation dans l’accès aux soins, le soutien des personnes âgées pour leur autonomie, l’innovation pharmaceutique, le financement des établissements de santé, l’amélioration de la protection sociale des travailleurs indépendants… Ambition d’autant plus nécessaire pour se projeter au-delà des difficultés persistantes liées à la crise sanitaire », une présentation des principales avancées de ce PLFSS reposant sur :

🔹 Une trajectoire financière a « revue pour prendre en compte l’effet des dernières prévisions économiques, plus favorables que celles de septembre mais aussi pour abonder les financements de l’assurance maladie et de la branche autonomie afin de tenir compte des surcoûts supplémentaires liés à la crise covid et à l’élargissement des mesures de revalorisation salariale du Ségur de la santé » avec un « ONDAM 2021 relevé de 1,7Md€ au cours des débats parlementaires, l’ONDAM 2022 de 0,5Md€ ».

🔹 Un accès aux soins « amélioré par des amendements sur la prise en charge par l’assurance maladie des consultations des psychologues, sur l’accès direct à certains professionnels de santé (orthophonistes, masseurs-kinésithérapeutes après avoir prévu dans le texte initial l’accès direct aux orthoptistes), sur l’obligation d’un entretien postnatal précoce ».

🔹 Une réforme de l’autonomie  » enrichie pour renforcer les mesures en faveur du maintien à domicile ».

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Retour sur les dispositions censurées et non censurées

1) Parmi les 27 dispositions censurées, nous avons retenu :

◼️ Mesures de contention ou d’isolement: l‘article 41 vient modifier les conditions dans lesquelles sont exécutées les mesures de contention ou d’isolement appliquées à des personnes hospitalisées sans leur consentement, et notamment les cas dans lesquels le juge des libertés et de la détention doit être saisi pour les renouveler au-delà de certaines durées.

Selon le Conseil constitutionnel « ces dispositions n’ont pas d’effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement. Elles ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées au paragraphe V de l’article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale. Dès lors, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale. Elles sont donc contraires à la Constitution. »

◼️Régulation des centres de santé : « l’article 70, qui soumet à de nouvelles obligations l’activité des centres de santé exerçant dans les domaines dentaire ou ophtalmologique, n’a pas d’effet ou a un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement.

Ces dispositions ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées au paragraphe V de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale. Dès lors, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale. Elles sont donc contraires à la Constitution ».

◼️Mise à disposition de l’accès gratuit au « guide du bon usage des examens d’imagerie médicale » : « l’article 75, qui prévoit les conditions dans lesquelles peut être expérimentée la prise en charge des frais occasionnés par la promotion et la mise à disposition de l’accès gratuit au guide du bon usage des examens d’imagerie médicale au sein de l’espace numérique des médecins généralistes, n’a pas d’effet ou a un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement.

Ces dispositions ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées au paragraphe V de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale. Dès lors, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale. Elles sont donc contraires à la Constitution ».

◼️Campagnes d’information afin de promouvoir, de communiquer et d’informer sur les compétences des sages-femmes : « l’article 87, qui se borne à prévoir que la Caisse nationale d’assurance maladie met en œuvre des campagnes d’information sur les compétences des sages-femmes, n’a pas d’effet ou a un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement.

Ces dispositions ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées au paragraphe V de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale. Dès lors, pour utiles qu’elles puissent être, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale. Elles sont donc contraires à la Constitution ».

◼️ Services numériques pour l’application du tiers payant intégral au panier 100% santé : « l’article 90, qui prévoit que les organismes d’assurance maladie complémentaire mettent à la disposition des professionnels de santé des services numériques en vue de l’application du dispositif du tiers payant sur certaines prestations en matière d’optique, d’audiologie et de soins dentaires, ne modifie pas les conditions selon lesquelles est assuré le paiement de la part des rémunérations prise en charge par les régimes obligatoires de base d’assurance maladie.

Dès lors, ces dispositions n’ont pas d’effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses et sur les recettes des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement. Elles ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées au paragraphe V de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale. Elles ne trouvent donc pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale et sont contraires à la Constitution ».

◼️ Information des patients et transmission de données personnelles aux professionnels de santé par les organismes de sécurité sociale : « l’article 95, qui organise le partage de certaines informations entre l’assurance maladie et les professionnels de santé et vise à améliorer l’information des assurés, n’a pas d’effet ou a un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement.

Ces dispositions ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées au paragraphe V de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale. Dès lors, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale. Elles sont donc contraires à la Constitution ».

◼️ Rapport visant à présenter l’avancement de la révision des actes hors nomenclature et de leur financement : l’article 63 prévoit que, dans un délai d’un an à compter de sa promulgation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la révision des actes hors nomenclature et leur financement.

Ces dispositions n’ont pas pour objet d’améliorer l’information et le contrôle du Parlement sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale au sens des dispositions du 4 ° du C du paragraphe V de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale. Dès lors, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale. Elles sont donc contraires à la Constitution.

◼️ Dématérialisation et transmission électronique des documents permettant la prise en charge des soins, produits et prestations (paragraphe II de l’article 37), expérimentation de plateformes d’appui gériatriques aux ESMS (article 48), Obligation d’accréditation pour les organismes procédant à l’évaluation des établissements et services sociaux et médico-sociaux (article 52), certification obligatoire pour les prestataires de service et distributeurs de matériel ( article 72 modifiant le calendrier de mise en place, par la Haute autorité de santé, d’un référentiel de bonnes pratiques et de la certification obligatoire des prestataires de service et des distributeurs de matériels destinés à favoriser l’autonomie et le retour à domicile) .

Chacune de ces dispositions n’a pas d’effet ou a un effet trop indirect sur les dépenses ou les recettes des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement et n’est pas relative aux modalités de recouvrement des cotisations et contributions affectées à ces régimes et organismes, ni aux règles portant sur la gestion des risques par ces mêmes régimes ou organismes. Elles ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées au paragraphe V de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale. Dès lors, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale. Sans que le Conseil constitutionnel ne préjuge de la conformité du contenu de ces dispositions aux autres exigences constitutionnelles, il y a lieu de constater que, adoptée selon une procédure contraire à la Constitution, chacune d’entre elles lui est donc contraire.

2) Parmi les dispositions déférées mais non censurées au regard de leur incidence attendue sur les dépenses d’assurance maladie, ces dispositions trouvant leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale et ayant été adoptées selon une procédure conforme à la Constitution :

◼️ Autorisation des orthoptistes à réaliser certains actes en accès direct et à établir certaines prescriptions (article 68).

◼️ Expérimentation de l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes (article 73) – Expérimentation de l’accès direct aux orthophonistes (article 74). Ces articles prévoient que l’État peut autoriser, à titre expérimental, respectivement les masseurs-kinésithérapeutes et les orthophonistes à exercer leur art sans prescription médicale pour une durée de trois ans et dans six départements.

◼️ Expérimentation de la primo-prescription par les infirmiers exerçant en pratique avancée pour des prescriptions médicales obligatoires (article 76). Cet article prévoit, à titre expérimental, que les IPA peuvent réaliser certaines prescriptions médicales.

◼️ Réalisation obligatoire d’un entretien postnatal précoce (article 86). Instauration à compter du 1er juillet 2022, d’un entretien postnatal précoce obligatoire. La création d’un entretien postnatal précoce obligatoire, pris en charge par l’assurance maladie, distinct des examens prénataux et postnataux obligatoires et destiné à l’ensemble des femmes ayant accouché, a une incidence sur les dépenses de l’année et des années ultérieures des régimes obligatoires de base qui affectent directement leur équilibre.

Pour aller plus loin:

Décision n° 2021-832 DC du 16 décembre 2021

Communiqué de presse du Ministère des Solidarités et de la santé suite à la Décision du Conseil constitutionnel du 16 décembre 2021

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Du FMESPP au FMIS

Du FMESPP au FMIS


Structures d’exercice coordonné – Etablissements et services médico-sociaux – Interopérabilité des logiciels informatiques

 

Créé par l’article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, se substituant au Fonds pour la modernisation des établissements de santé prévu par l’article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, le Fonds de Modernisation des Etablissements de Santé Publics et Privés (FMESPP) a jusqu’à présent eu pour mission d’accompagner les établissements de santé et les groupements de coopération sanitaire pour leurs dépenses relatives à l’investissement.

Ainsi et depuis 2014, près de 90 % des crédits délégués par le FMESPP ont été orientés vers deux postes : les investissements immobiliers liés aux projets validés en COPERMO, à hauteur de 69 % des dépenses, et le plan hôpital numérique, à hauteur de 19 % du fonds[i].

Le Ségur de la santé, dont les conclusions ont été rendues le 20 juillet 2020 puis le plan « France Relance » présenté par le Gouvernement le 3 septembre dernier sont venus  entériner l’engagement politique pris du déploiement d’un plan d’investissement de 6 milliards d’euros en faveur de la santé, au-delà du seul secteur sanitaire.

Ce plan d’investissement annoncé comme ayant pour vocation de répondre à une logique décloisonnée et transversale doit non seulement concerner les établissements de santé mais également le secteur médico-social, et en priorité les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

Afin de servir de support à l’allocation des aides à l’investissement s’inscrivant dans le cadre de ce plan massif d’investissement proposition va être faite dans le cadre du PLFSS 2020 pour 2021 de créer un fonds transversal d’investissement dédié à l’accompagnement de la transformation du système de santé par extension des missions du FMESPP, emportant changement de sa dénomination au bénéfice de celle de Fonds pour la Modernisation et l’’Investissement en Santé (FMIS), sans modification de son mode de fonctionnement et de délégation des crédits.

Evolution du FMESPP en FMIS 

L’évolution de la forme juridique du FMESPP  induit, comme évoqué précédemment, un changement dans sa dénomination mais aussi de ses principes et fondements par la voie de l’introduction d’un article 26 au PLFSS dans sa version déposée sur le bureau de l’Assemblée Nationale lequel vient donner corps à :

− L’extension des missions du FMESPP au-delà des établissements de santé et des groupements de coopération sanitaire pour viser les structures d’exercice coordonné (équipes de soins primaires, communautés professionnelles territoriales de santé, centres de santé, maisons de santé) ainsi que les établissements et services médico-sociaux mentionnés à l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles,

− Des dépenses financées par le fonds qui relèveront des actions ayant pour objet la modernisation, l’adaptation ou la restructuration des systèmes d’information de l’offre de soins et de l’offre médico-sociale,

− L’alignement des délais de déchéance des crédits du fonds supérieurs à 1 an avec les calendriers d’exécution des projets (renvoie à un décret pour en définir les modalités),

− Enfin, concernant les ressources de ce nouveau fonds issues de la branche maladie : principe de leur constitution également par une dotation de la nouvelle branche autonomie, en cohérence avec l’élargissement de son périmètre aux établissements médico-sociaux et son caractère transversal.

Apports des débats à l’Assemblée nationale et au Sénat 

 Les débats devant l’Assemblée nationale comme au Senat vont se cristalliser autour des questions portant sur les bénéficiaires du fonds et l’exigence d’interopérabilité des logiciels informatiques en cas de demande de financement.

Les structures d’exercice coordonnée maintenues comme bénéficiaires du FMIS

Si l’extension du bénéfice du FMIS aux territoires de Saint-Barthélemy et Saint Martin introduit par le Sénat, maintenu par l’Assemblée nationale ne va pas poser débat, il n’en n’aura pas été de même concernant les structures pouvant bénéficier du fonds.

En effet, le Sénat va adopter deux amendements identiques de Mr Alain Million, Mme Florence Lassarade et plusieurs de leurs collègues du groupe Les républicains visant à supprimer la référence aux « équipes de soins primaires, communautés professionnelles territoriales de santé, centres de santé, maisons de santé » comme structures d’exercice coordonné pouvant bénéficier du fonds d’investissement, afin d’ouvrir cette référence à l’exercice coordonné aux cabinets libéraux.

Maintenant son avis exposé en Commission des affaires sociales en première lecture à l’Assemblée nationale, le rapporteur général, Mr Thomas Mesnier va s’opposer fermement à l’élargissement du périmètre des structures d’exercice coordonné voté par le Sénat – et donc par conséquent à l’extension du FMIS au financement de l’investissement des cabinets libéraux – au motif que « des aides à l’investissement existent déjà pour les médecins libéraux, et, si elles doivent se développer, c’est avant tout dans le cadre conventionnel ».

Interopérabilité des logiciels informatiques

 Absent du PLFSS dans la version déposée, l’interopérabilité des logiciels informatiques dans le cadre des dépenses engagées pour la transformation et la modernisation des systèmes informatiques va, à l’occasion de propositions soutenues par des parlementaires appartenant à la majorité présidentielle en la personne de Mme Stéphanie Rist et de ses collègues du groupe La République en Marche, contre l’avis parfois du gouvernement, du rapporteur de la Commission des affaires sociales à l’Assemblée nationale  faire l’objet de débats devant les deux assemblées.

Ainsi, dès l’examen de l’article en séance publique en première lecture devant l’Assemblée nationale deux amendements vont être adoptés et porter :

− Pour l’un avec avis favorable de la Commission des affaires sociales et du Gouvernement conditionnant le financement des dépenses engagées pour la transformation et la modernisation des systèmes informatiques  à une exigence d’interopérabilité des logiciels, ;

− Pour l’autre, avec cette fois un avis défavorable de la même commission et du Gouvernement, la possibilité offerte aux établissements publics de santé de refuser, lors de l’utilisation de ces financements pour l’achat de logiciels informatiques, le paiement de la facture lorsque les référentiels d’interopérabilité ne sont pas respectés.

Ce dernier sera supprimé par le Sénat suite à l’adoption d’un amendement de suppression soutenu par M. Martin Lévrier et ses collègues du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. L’ avis du gouvernement sera favorable à cette suppression, le rapporteur considérant notamment la disposition ainsi introduite comme contraire au droit des marchés publics.

Mme Stéphanie Rist soutenue par des parlementaires va alors lors des ultimes débats devant l’Assemblé nationale revenir sur le sujet pour arracher un vote favorable et obtenir que l’interopérabilité des logiciels soit l’un des critères pris en considération par l’établissement public de santé dans le cadre de l’attribution d’un marché.

Sera rappelé et mis en exergue au soutien de la discussion :

− « Une crise sanitaire qui aura mis en évidence la nécessité d’une meilleure coopération entre les professionnels de la santé. Sur le terrain, le manque d’interopérabilité entre logiciels fait toutefois obstacle à ce travail en commun ». (Mme Stéphanie Rist)

− Mr Paul Christophe fera état des difficultés rencontrées pour remplir les DMP, les dossiers médicaux partagés, liés à ce déficit d’interopérabilité ; de ses discussions sur cette question avec des cabinets de radiologie, dont il aura appris que cette option n’existe pas dans leurs logiciels, il dira qu’ « adopter cet amendement permettrait donc d’obliger les éditeurs à implémenter leurs logiciels avec des dispositifs d’interopérabilité. La mesure ne constituerait pas une charge pour les établissements ni pour les particuliers mais rendrait notre système de santé plus efficace. »

− Mr Philippe Vigier soulignera que « pour qui connaît les difficultés informatiques rencontrées dans les hôpitaux, il apparaît évident que l’interopérabilité entre les systèmes d’information de la santé doit être une exigence absolue. Dans le cas contraire, l’organisation continuera à ressembler aux tuyaux d’un orgue : chacun dépense beaucoup d’argent pour des systèmes qui ne communiquent pas. C’est pour cette raison que le fameux DMP, ce dossier attendu depuis si longtemps qui doit rassembler toutes les informations médicales, ne fonctionne toujours pas. L’interopérabilité est à la base de tout. Si on ne la met pas en place, l’échec est assuré. L’inscription dans la loi de l’interopérabilité parmi les critères d’attribution d’un marché public me semble frappée au coin du bon sens. La refuser reviendrait à assumer pour longtemps des dépenses inutiles. »

 − Enfin pour Mme Marie Tamarelle – Verhaege « il y a là un enjeu majeur. Comme cela a été très bien expliqué par mes collègues, l’exigence d’interopérabilité n’a rien d’évident et, pour la satisfaire, il ne suffit pas de se fier à la bonne volonté des opérateurs. L’absence d’interopérabilité entre les MDPH, les maisons départementales des personnes handicapées, constitue ainsi un vrai problème qui nuit à leurs usagers. Par ailleurs, faute d’obliger un éditeur à garantir l’interopérabilité de son logiciel, on risque de lui laisser la mainmise sur le marché au moment où des produits concurrents apparaîtront. L’adoption de l’amendement me semble donc indispensable. »

Le rapporteur Mr Thomas Mesnier fera valoir, sans succès, que l’article 26 prévoit déjà « que l’interopérabilité des logiciels soit une condition au financement des dépenses engagées pour la transformation et la modernisation des systèmes informatiques. Si les exigences d’interopérabilité doivent, à l’évidence, être prises en considération par les professionnels et par les structures en tant que critères dans le cahier des charges et dans l’achat des logiciels avant tout paiement, il me semble que leur inscription comme critère d’engagement des marchés publics serait redondante avec la mesure déjà adoptée en première lecture. Par ailleurs, en modifiant les règles applicables aux marchés publics, on s’éloignerait trop du champ de l’article 26 et même de celui des lois de financement de la sécurité sociale. C’est bien le code des marchés publics qu’il faudrait modifier. »

Voté, cet article contient désormais :

− L’exigence d’interopérabilité, exclusivement concernant les logiciels informatiques au financement des dépenses engagées pour la transformation et la modernisation des systèmes informatiques.

A cet égard nous nous devons de faire observer que « interopérabilité » et « financement » (aides conditionnées) sont régulièrement évoquées à l’occasion des diverses discussions nées de l’agacement d’un virage numérique dont on a considéré qu’il tardait trop à être pris. En effet, outre de nombreux rapports pointant cet obstacle (celui de l’interopérabilité) l’inscription dans la loi d’une corrélation entre « financement » et « interopérabilité » est inscrite dans le code de la santé publique, à la faveur d’amendements sénatoriaux lors de la discussion du projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé. Nous faisons là référence à l’article L 1110-4-2 – II [ii] introduit au code de la santé publique par la loi 2019-774 du 24 juillet 2019 en vertu duquel est conditionné à des engagements de mise en conformité aux référentiels d’interopérabilité dans les conditions prévues au I ( i.e La conformité d’un système d’information ou d’un service ou outil numérique en santé aux référentiels d’interopérabilité est attestée dans le cadre d’une procédure d’évaluation et de certification définie par décret en Conseil d’Etat) l’attribution de fonds publics tels que ceux  dédiés au financement d’opérations de conception, d’acquisition ou de renouvellement de systèmes d’information ou de services ou outils numériques en santé mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 1110-4-1. » L’entrée en vigueur de ce dispositif est soumis à la publication d’un décret ; il interviendra en tout état de cause au plus tard le 01 janvier 2023[iii].

− Lors de l’utilisation de ces financements pour l’achat de logiciels informatiques par les établissements publics de santé, l’interopérabilité des logiciels informatiques doit être l’un des critères d’attribution du marché.

Le Conseil constitutionnel n’ayant pas été saisi sur la PLFSS votée seul l’avenir et la manière dont les acteurs de terrain se saisiront, ou non d’ailleurs, des principes inscrits dans cet article 26 (désormais 49 de la Loi de financement de la sécurité sociale de 2020 pour 2021) nous éclaireront. « Cavalier social », modifications rendues obligatoire du code de la commande publique ?

Focus sur le Conseil national de l’investissement en santé – Une proposition du Sénat rejetée par l’Assemblée nationale

Les conclusions du Ségur de la santé prévoient de remplacer le Comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers (COPERMO), qui instruit et valide actuellement les investissements hospitaliers, « par un conseil national de l’investissement en santé, porteur d’une nouvelle approche fondée sur l’équité territoriale, le conseil et l’association des élus locaux à la prise de décision ».

 Adoptant un amendement de sa Commission des affaires sociales le Sénat considérant que la création annoncée mérite d’être entérinée au niveau législatif et non simplement par voie réglementaire, va attribuer pour mission à ce nouveau Conseil national de l’investissement en santé d’assurer un rôle de pilotage et de coordination de la sélection des projets financés par le FMIS, sa composition (notamment de représentants d’élus locaux) ainsi que les modalités de son fonctionnement étant fixées par voie réglementaire.

Cet amendement fera l’objet d’un rejet pur et simple par l’Assemblée nationale en dernière lecture.

Texte réglementaire à modifier 

Le décret n°2013-1217 du 23 décembre 2013 relatif au fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés devra être modifié afin de tenir compte des évolutions induites par l’article 49 de la LFSS pour 2021, ce qui devrait être fait début 2021.

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[i] Cf. Etude d’impact conduite dans le cadre de la proposition d’évolution du FMESPP en FMIS –
[ii] Les fonds dont il est fait mention dans cet article sont à l’époque ceux issus notamment du fonds régional d’intervention (FIR) ou des grands programmes ministériels tels que le plan « Hôpital numérique » (HOP’EN), du plan « e-parcours », ou encore celui lié à l’incitation financière pour l’amélioration de la qualité (Ifaq) 
[iii] Le délai de trois ans consenti devait permettre à l’ensemble des acteurs du secteur du numérique en santé de se mettre en ordre de marche, avec une date butoir fixée au 1er janvier 2023 qui leur laisse une marge d’anticipation.
Texte définitif du PLFSS 2020 pour 2021 – Focus sur l’Introduction du Conventionnement sélectif des centres de santé – article 64

Texte définitif du PLFSS 2020 pour 2021 – Focus sur l’Introduction du Conventionnement sélectif des centres de santé – article 64

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a été ce lundi 30 novembre adopté en lecture définitive par les députés devant un hémicycle parsemé.

Alors que la pandémie de Covid-19 a durablement affecté les comptes, ce PLFSS porte de grandes ambitions, largement relayées et commentées, au titre desquelles notamment l’instauration d’un 5ème pilier de protection sociale dédié à l’autonomie, branche spécifique pour la Sécurité Sociale, ou encore des revalorisations salariales pour les professionnels de santé en première ligne face au Covid.

Le texte définitif sera soumis dans les prochains jours au Conseil Constitutionnel. Dans cette attente et indépendamment, nous vous proposerons dans ces pages un tour d’horizon de certaines mesures adoptées, éclairé des éventuels débats suscités.

Nous entamons ce dernier par la présentation de l’article 64 introduisant le conventionnement sélectif des centres de santé.

Le 23 octobre dernier lors de l’examen en séance publique du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2020 pour 2021 le gouvernement usant en cela du droit d’amendement dévolu par la Constitution a soumis au vote des parlementaires un nouvel article inséré après l’article 33 visant « à permettre aux partenaires conventionnels de négocier sur une régulation démographique au conventionnement des centres de santé ».

Plus précisément et selon exposé des motifs :

« Le code de la sécurité sociale prévoit la possibilité de mise en place de mesures de régulation du conventionnement dans les zones dans lesquelles le niveau de l’offre de soins est particulièrement élevé, pour certaines professions de santé. Ces mesures de limitation d’accès au conventionnement peuvent être définies dans les conventions nationales des infirmiers (article L.162-12-2 CSS), masseurs kinésithérapeutes (article L.162-12-9 CSS), chirurgiens-dentistes et sages-femmes (L.162-9 CSS).

Ces mesures s’inscrivent dans un objectif de meilleure répartition de l’offre de soins sur le territoire pour mieux répondre aux besoins des patients.

L’objectif de la mesure proposée est de pouvoir définir, le cas échéant, des mesures de limitation d’accès au conventionnement des centres de santé à l’accord national (article L.162-32-1 CSS) à l’instar des professionnels de santé exerçant en libéral afin d’assurer une cohérence dans les dispositifs de régulation sur un territoire donné.

L’offre des centres de santé et l’offre des professionnels de santé libéraux sont en effet complémentaires sur les territoires – l’offre des centres de santé étant d’ailleurs déjà prise en compte dans le cadre de la méthodologie utilisée pour définir les zonages mono-professionnels [i].

 Les contrats incitatifs pour favoriser l’installation et le maintien dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante sont proposés à la fois dans les conventions nationales des professionnels de santé libéraux et dans l’accord national des centres de santé. Il apparait justifié de permettre la mise en place de la même manière des mesures de régulation au conventionnement dans les zones sur-dotées à la fois sur l’offre de soins libérale et l’offre de soins offerte par les centres de santé. »

Cet amendement intervient dans un contexte lancinant où tandis que l’installation des professionnels de santé libéraux se trouve étroitement liée aux contraintes posées par le dispositif de régulation défini par les règlements conventionnels celle des centres de santé, sur une même typologie d’offre de soins s’en trouve décorrélée, le paradoxe s’accentuant quand ces mêmes règlements conventionnels dans le cadre du recensement de l’offre de soins objet de la régulation et opposable prennent en compte dans le décompte les centres de santé ! [ii]

Ce paradoxe, Mme Sereine Mauborgne (Députée LAREM) ne manquera pas de le rappeler en ces termes : « Au nom du groupe d’études consacré aux professions paramédicales, je tiens à dire que nous soutenons très fortement cet amendement du Gouvernement. Il est totalement anormal que des centres de ce type s’installent dans les zones surdotées alors que les professionnels de santé font l’objet d’une régulation. »

Tout en apportant son soutien à l’amendement déposé par le gouvernement, Thibault Bazin (Député LR) va tenir à préciser que ce dernier « ne règle pas certains problèmes. En effet, certains centres, qui disposent de structures financières domiciliées à l’étranger, font appel à des praticiens dont la compétence n’est pas garantie ou enfreignent les règles déontologiques, notamment en matière de publicité. Je dois vous concéder, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles, qu’une ordonnance de 2018 a posé des garde-fous, mais ils ne sont pas suffisants. Il faut donc renforcer notre législation, et je vous invite à compléter l’arsenal dont nous disposons en la matière en rétablissant l’agrément préalable [iii], en alignant les règles déontologiques et régulant l’activité de ces centres. »

Cet amendement à peine voté un communiqué porté par la Fédération des centres de santé, l’Union syndicale des médecins de centres de santé et le Syndicat national des chirurgiens – dentistes des centres de santé sera diffusé [iv] dans lequel ces derniers s’interrogent « sur une volonté cachée d’affaiblir la progression des centres de santé alors que leur développement actuel montre leur efficacité à répondre au défi de la désertification médicale. Si la régulation semble nécessaire, elle ne peut se faire de la même manière entre un mode d’exercice individuelle et une structure pluridisciplinaire ». Contrairement à ce que l’exposé des motifs indique « les aides à l’installation des professionnels dans les territoires sous dotés sont moins importantes pour les centres de santé. Ces derniers ne bénéficient pas non plus des dispositifs d’aide comme PTMG, ou PTMR ». Enfin, toujours d’après le communiqué de presse, « cet amendement ne résout en rien les menaces de certaines pratiques qui détournent le concept de centres de santé mais par contre il est profondément injuste pour les engagements vertueux des autres. Il menace le développement d’une pratique de centres de santé pluriprofessionnelle en plein essor dans l’offre de soin de ville dont de nombreux territoires se dotent aujourd’hui pour répondre à leurs besoins. »

Le Sénat, à l’initiative de sa Commission des affaires sociales et avec un avis défavorable du Gouvernement, va alors adopter un amendement précisant que les conditions relatives aux zones d’exercice applicables aux professionnels de santé salariés des centres de santé devaient être définies sur la base des dispositions applicables aux professionnels de santé libéraux.

Parce que considérant comme satisfaite la préoccupation du Sénat mais dont l’amendement tel qu’adopté reviendrait « néanmoins à subordonner les négociations entre les organismes d’assurance maladie et les centres de santé aux négociations de conventions mono-professionnelles, ce qui n’est pas jugé souhaitable » au sein de la Commission des affaires sociales de l’Assemblé nationale, l’article dans sa rédaction initiale, à l’initiative de son rapporteur général sera rétabli en dernière lecture.

 *****

 [i] Cf. dispositifs de « conventionnement sélectif » applicables aux infirmiers, sages-femmes et masseurs-kinésithérapeutes libéraux, conditionnant l’accès au conventionnement dans les zones identifiées comme sur-dotées à la cessation définitive de l’activité libérale d’un confrère conventionné.

 [ii] A titre d’exemple : Avenant n°6 à la Convention nationale organisant les rapports entre les infirmiers et l’assurance maladie signée le 22 juin 2007– Conclu le 29 mars 2019 entre, d’une part, l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) et, d’autre part, 2 des 3 syndicats représentatifs de la profession, la Fédération nationale des infirmiers (FNI) et le Syndicat national des infirmières et des infirmiers libéraux (SNIIL)approuvé par avis publié au Journal officiel du 13 juin 2019.

 [iii] En 2009, la loi dite HPST (hôpital, patients, santé, territoire) a introduit une modification dans les règles d’ouverture des centres de santé. Elle a transformé l’agrément préalable de l’Agence régionale de santé (ARS) en une simple déclaration sur la base d’un projet de santé et d’un règlement intérieur.

 [iv] https://www.fncs.org/les-centres-de-sante-refusent-un-amendement-en-trompe-l-oeil

Texte définitif du PLFSS 2020 pour 2021 – Focus sur l’Introduction du Conventionnement sélectif des centres de santé – article 64

Texte définitif du PLFSS 2020 pour 2021 – Focus sur l’incitation au développement de l’autodialyse et de la dialyse à domicile – article 55

Nous poursuivons notre tour d’horizon de certaines mesures adoptées, éclairé des éventuels débats suscités, que nous annoncions dans une actualité précédente par la présentation du dispositif d’incitation au développement de l’autodialyse et de la dialyse à domicile au sein du dispositif de paiement à la qualité des établissements de santé.

Si l’on devait reprendre chacun des projets de loi de financement de la sécurité sociale sur ces 10 dernières années nous ne pourrions que dresser le constat a minima d’une attention de nos parlementaires à la question de la prise en charge des patients en IRCT au gré de la publication tantôt d’un rapport de la Cour des Comptes [i], de celui du HCAAM [ii] ou encore de celui consacré à l’évolution des charges et produits de l’Assurance maladie [iii], ces « attentions » étant selon et parfois suivies d’effet. Ainsi en aura-t-il été lors de la loi de financement de la sécurité sociale de 2018 pour 2019 avec l’instauration du forfait MRC.

Le PLFSS de cette année semble s’inscrire dans cette tendance avec l’introduction d’un mécanisme de « bonus/malus », incitatif au « développement de l’autodialyse et de la dialyse à domicile au travers de l’instauration de catégories d’indicateurs pour lesquels des seuils minimaux de résultats seront requis » dans le cadre du dispositif de paiement à la qualité des établissements de santé (i.e. dotation « IFAQ » – cf article 37 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019).

Outre la qualité des porteurs de l’amendement, les arguments présentés au soutien de ce dernier introduit et voté en séance publique lors de la 1ère lecture devant l’Assemblée nationale [iv], sont circonstanciés et poursuivent une certaine logique, pour ne pas dire une logique certaine !

Ainsi :

« L’article 37 de la LFSS pour 2019 renforce le dispositif de paiement à la qualité des établissements de santé (dotation « IFAQ »). L’article instaure un système de bonus-malus. Ce dispositif repose sur les résultats des indicateurs de qualité et de sécurité des soins qui sont mesurés tous les ans dans chaque établissement. Pour certains indicateurs, si un établissement n’atteint pas, pendant trois années consécutives et pour un même indicateur, un seuil minimal, il s’expose à une pénalité financière.

Lors du printemps de l’évaluation organisé en 2020 [v], l’article 37 ainsi que l’article 38 (financement forfaitaire de pathologies chroniques) ont été évalués par Madame la Députée Audrey Dufeu et Messieurs les Députés Julien Borowczyk et Marc Delatte. Au cours des auditions, de nombreux acteurs ont souligné la faible proportion de patients en autodialyse et dialyse à domicile en France. La HAS [vi], en 2013, a souligné que ces modes de prises en charge amélioraient la qualité de soins par rapport à une prise en charge en centre ou en UDM

Cependant, le modèle financement à l’acte ne récompense pas les établissements qui orientent leurs patients à domicile et incite au contraire à une activité sur site, au détriment de la qualité des soins et des finances de l’Assurance maladie

Le développement du financement à la qualité offre ici une réelle opportunité. Elle permettra, à défaut de mieux rémunérer les établissements qui atteignent les objectifs fixés de patients adressés vers une prise en charge à domicile ou en autodialyse, de pénaliser ceux qui ne développent pas assez ces pratiques et incitera les établissements à s’orienter vers des pratiques plus vertueuses

Aussi, le présent amendement propose la mise en place d’un malus en fonction des résultats des établissements en matière d’orientation d’un nombre de patients en dialyse à domicile et autodialyse. Il n’ouvre pas droit à une dotation complémentaire. »

Le Sénat lors de son examen va en voter la suppression au motif que « Les préoccupations des auteurs de l’amendement quant au développement insuffisant en France de l’autodialyse ou de la dialyse à domicile sont légitimes. Cependant, le recours à l’une ou l’autre de ces pratiques relève d’abord du colloque singulier entre le médecin et son patient. De surcroît, la précision apportée ne relève pas du niveau législatif puisque la définition des indicateurs est fixée par voie réglementaire. »

A la faveur de la navette parlementaire le dispositif va, finalement sans surprise être rétabli lors des débats devant l’Assemblée nationale [vii], la Commission des affaires sociales considérant au demeurant « les critiques formulées par le Sénat à l’encontre de cet article légitimes mais sévères ».

C’est un débat lancinant que celui du développement qui se ferait trop attendre du point de vue du pouvoir exécutif, quelque soit celui d’ailleurs à s’y être penché, comme d’associations d’usagers tirant exemple de la part significative de proportion de patients pris en charge sur des modalités ou organisations relevant de ce qu’il est commun d’appeler le « domicile» [viii] en IRCT et relevé, depuis plusieurs années dans certains des pays européens ou outre – manche.

Les arguments présentés de part et d’autre demeurent invariés ; les « débats », prises de position sur lesquelles campent les deux Chambres illustrent parfaitement à la fois la posture comme le climat de défiance qui s’est installé et a prospéré au gré notamment de déclarations, communiqués, Etats généraux (en 2012), multiples rapports, propositions avortées d’expérimentation et sur lesquels nous nous abstiendrons dans ces lignes d’en faire davantage commentaires.

Au moment où nous publions ces lignes, nous ne pouvons présager du devenir de ce dispositif introduit à l’article 55 de la LFSS, de son examen par le Conseil constitutionnel ; peu importe en réalité car quoi qu’il en soit, comme l’a fort à propos susurré, pour ne pas dire suggéré le Sénat, un dispositif de type réglementaire pourrait notamment, en cas de censure, favorablement accueillir le mécanisme incitatif envisagé.

Un processus est en marche, à marche forcée diraient certains mais en marche ! c’est ce que les acteurs de santé doivent de notre point de vue d’observateur intégrer dans leur raisonnement, leurs approches et évolutions dans les propositions de prises en charge.

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[i] Rapport public annuel 2020 – février 2020 : L’insuffisance rénale chronique terminale : une prise en charge à réformer au bénéfice des patients – https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-02/20200225-03-TomeI-insuffisance-renale-chronique-terminale.pdf qui fait suite à celui de Septembre 2015 : Chapitre X L’insuffisance rénale chronique terminale : favoriser des prises en charge plus efficientes – https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/20150915-rapport-securite-sociale-2015-insuffisance-renale-chronique-terminale.pdf

[ii] Avis HCAAM du 13 juillet 2016 « innovation et système de santé » – https://www.securite-sociale.fr/files/live/sites/SSFR/files/medias/HCAAM/2016/AVIS/AVIS_DU_HCAAM_SUR_LES_INNOVATIONS_ET_SYSTEME_DE_SANTE.pdf

[iii] Rapport au ministre chargé de la Sécurité sociale et au Parlement sur l’évolution des charges et des produits de l’Assurance Maladie au titre de 2020 – juillet 2019 – https://www.ameli.fr/sites/default/files/2019-07-03-dp-rapport-charges-produits-2020.pdf

 [iv] Un premier amendement avait été présenté par Madame Valérie Six en commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale mais avait été rejeté; présenté en séance publique et soutenu par Madame la députée Audrey Dufeu et Messieurs les Députés Julien Borowczyk et Marc Delatte, le dispositif instauré par l’amendement obtient l’avis favorable du Ministre des solidarités et de la santé Olivier Véran, ainsi que celui à titre personnel du rapporteur de la commission.

 [v] Rapport d’information déposé en application de l’article 145 du règlement par la Commission des affaires sociales en conclusion des travaux du printemps social de l’évaluation : Microsoft Word – i3251.docx (assemblee-nationale.fr)

[vi] Évaluation médico-économique des stratégies de prise en charge de l’insuffisance rénale chronique terminale en France – Octobre 2014 https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2014-11/synthese_irct_vf.pdf

 [vii] Sous couvert d’une modification rédactionnelle de l’article 55, nouvellement introduit à l’article L. 162-23-15 du code de la sécurité sociale

[viii] Le terme de « hors centre » serait impropre ici en ce qu’il inclue l’unité de dialyse médicalisée, non visée au dispositif

Texte définitif du PLFSS 2020 pour 2021 – Focus sur l’Introduction du Conventionnement sélectif des centres de santé – article 64

Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 : Examen en Commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale ces 13 et 14 octobre 2020

Le PLFSS pour 2021 a été présenté en Conseil des ministres le 7 octobre dernier par Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la relance, par Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé et par Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics.

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée Nationale le 7 octobre dernier, ce projet va être examiné par la Commission des affaires sociales ces 13 et 14 octobre, l’audition des ministres concernés étant intervenue.

Au titre des mesures ayant retenu particulièrement notre attention :

  • Contribution au financement de la prime COVID pour les personnels des services d’aide et d’accompagnement à domicile – article 4
  • Revalorisation des carrières des personnels non médicaux dans les établissements de santé et les EHPAD – article 25
  • Relancer l’investissement pour la santé article 26

Ce plan de 6 milliards d’euros s’inscrit dans le plan de relance de l’économie. Financements identifiés: projets hospitaliers prioritaires et d’investissement de type « ville- hôpital », numérique en santé,  transformation, rénovation et équipements des établissements médico-sociaux au titre de l’investissement numérique. 

  •  Dotations aux établissements de santé assurant le service public hospitalier article 27

Cet effort représente un montant d’environ 13 milliards d’euros.

L’octroi de ces financements est annoncé comme devant se faire dans le cadre d’une décision partagée avec les acteurs du territoire afin de maintenir une sélectivité des investissements apportant une amélioration de l’offre de soins sur les territoires. Les crédits équivalents au refinancement d’un tiers de la dette des établissements assurant le service public hospitalier afin de leur redonner rapidement les moyens d’investir.

  • Poursuite de la réforme du financement des établissements de santé article 28

Ce qui esvisé par cet article c’est un ajustement du calendrier de travail d’un certain nombre de réformes telles que celles portant sur la réforme du ticket modérateur en psychiatrie et SSR, la période de transition du nouveau modèle de financement des activités de SSR, la transition vers le modèle de financement des hôpitaux de proximité, les expérimentations sur les règles d’organisation et de financement des transports sanitaires urgents préhospitaliers, la réforme du financement des centres de lutte contre la tuberculose ou encore la réforme des contrats d’amélioration de la qualité en établissement de santé.

Cet article vise également à compléter la réforme du modèle de financement des structures des urgences engagée par la précédente LFSS. Il modifie les règles de participation des assurés qui passent aux urgences sans être hospitalisé (cf. forfait patient urgences dont il a été beaucoup fait mention ces derniers temps dans la presse).

Il vise enfin à clarifier les règles de fonctionnement de financement des hôpitaux de jour

  • Expérimentation du modèle mixte de financement des activités de médecinearticle 29

La mesure proposée permet d’expérimenter sur 5 ans un nouveau mode de financement de l’activité de médecine à l’échelle territoriale combinant une part de financement à l’activité, une part de financement dit populationnelle et une part de financement à la qualité.

Dès 2021, et afin d’engager les établissements de santé dans la démarche, ceux-ci pourront bénéficier pour une part de leur financement, d’une dotation socle, en lieu et place de la T2A, dont le pourcentage devrait être déterminés par décret.

Ce « droit d’option » sera contractualisé avec les ARS sur des objectifs de qualité des prises en charge, de réponse aux besoins du territoire et de participation aux travaux d’expérimentation relatif au modèle cible de financement

  • Pérennisation et développement des maisons de naissancearticle 30

Les résultats positifs atteint par les 8 structures implantées dans 6 régions (Île-de-France, Occitanie, Auvergne Rhône-Alpes, Grand-Est, Guadeloupe, La Réunion) et qui ont fait l’objet d’un rapport au Parlement cet été ont conduit le gouvernement à décider de leur pérennisation et de leur développement.

Ce dernier se fera en tenant compte du besoin local avec une montée en charge de ces maisons de naissance progressive (mesure lissée sur 2 ans) pour atteindre 20 structures à échéance de fin 2022

  • Soutien au développement des hôtels hospitaliers article 31

Ces hébergements non médicalisés de patients en amont ou en aval de leur prise en charge hospitalière ont fait l’objet d’une expérimentation menée depuis 2015, laquelle a fait l’objet d’un rapport remis au Parlement en Juin 2020.

Cette expérimentation a permis de mettre en exergue des enjeux en termes de santé publique, d’amélioration des organisations ou encore d’économie direct pour l’assurance maladie qui conduisent conformément aux conclusions du Ségur de la santé a proposé un élargissement de ce dispositif

  • Prise en charge intégrale par l’assurance maladie obligatoire des téléconsultations article 32

 Afin d’accompagner l’essor de cette pratique, proposition d’un prolongement jusqu’à la fin de l’année 2021 de la mesure dérogatoire de prise en charge à 100 % de ces téléconsultations formalisée et ce aux fins de laisser le temps aux partenaires conventionnels de redéfinir les conditions du recours à cette pratique et aux professionnels de santé de s’équiper des outils et solutions techniques permettant sa gestion dans le droit commun

  • Adaptation du dispositif de prise en charge exceptionnelle par l’assurance maladie en cas de risques sanitaires gravesarticle 36
  • Renforcement de la qualité des prestations de soins à domicilearticle 39

 Le rapport de l’IGAS de janvier 2020 relatif aux missions des prestataires de service et distributeurs de matériel a mis en exergue plusieurs constats qui nécessiteraient des évolutions législatives pour renforcer les garanties de qualité, de bonne pratique et de bonne usage des ressources publiques.

L’article 39 vise à faire évoluer et renforcer le mécanisme de conventionnement déjà existant entre les prestataire et l’assurance maladie.

La certification qualité de ces prestataires de service deviendra une condition d’accès préalable à l’enregistrement et au conventionnement. Au-delà de l’accès au tiers payant, l’accès à la prise en charge des patients sera conditionnée à l’obtention de cette certification qualité

  • Isolement et contentionarticle 42

Il s’agit par cet article 42 de tirer les conséquences de la décision 2020- 844 QPC du 19/6/2020 du Conseil constitutionnel laquelle avait déclaré l’article L 3222- 5- 1 du code de la santé publique comme contraire à la constitution et ainsi venir fixer des durées maximales pour l’isolement et là contention qui soit comme recommandation de la haute autorité de la santé et en instaurant et précisant les modalités du contrôle du juge des libertés et de la détention sur ces mesures

Nous nous attacherons dans ces pages à vous retranscrire au plus près de l’actualité le sort de ces articles au gré des différents amendements, débats, votes intervenant au sein des différentes Commissions, séances publiques se tenant à l’Assemblée Nationale comme au Sénat.

A consulter :